La saison cyclo reprend, et pour la 5e fois consécutive, c'est avec la Jacques Gouin, que je la démarre.
Contrairement aux autres fois, je n'y serais pas seul, et je l'aborde dans un état d'esprit différent, celui de l'effectuer avec un groupe d'amis, et de me mettre le plus possible à leur service.
Les conditions météos sont annoncées vraiment mauvaises, mais elles restent correctes lorsque j'arrive à Mennecy. Je retrouve Jean-François, que j'ai rencontré lors de la traversée des Alpes l'an dernier, et avec qui j'avais passé d'excellents moments. Il est venu avec Bruno, qui roule dans son club, c'est sa première participation à une cyclosportive, et nul doute qu'il s'en souviendra.
Après un échauffement rapide, nous regagnons notre SAS. Le départ est donné à 9h, et lorsque nous franchissons la grille du parc du château, je sens les premières gouttes de pluie tomber.
Nous restons groupés dans la 1ère montée, alors qu'à son sommet, la pluie a elle aussi déjà prise son rythme de croisière.
Nous progressons parmi un groupe de coureurs et atteignons la 1ère côte, 10 km plus loin. Je frotte un peu avec un autre coureur, lorsqu'une voiture descend en sens inverse, mais ça passe.
Nous veillons à nous regrouper en haut de chaque côte, afin d'aborder les parties qui sont face au vent, ou de coté, en nous protégeant mutuellement. Et il faut dire qu'il est particulièrement violent le vent, dans les plaines de l'Essonne, 70 km/h étaient annoncés la veille. JF assure de longs relais devant, et je le seconde afin que Bruno soit le plus possible protégé.
La pluie et le vent ne s'arrêtent pas, et ils font progressivement leur travail de sape. Après 30 km, je me dis intérieurement, que les derniers kilomètres vont me sembler bien long, mais personne ne bronche dans notre petit groupe, et le moral reste au beau fixe.
Nous croisons déjà pas mal de coureurs qui ont crevé ou qui font demi-tour pour rentrer. Nous en dépassons quelques uns qui ont pris le parti de revêtir le cuissard court, j'en ai froid pour eux.
Côte après côte, partie ventée après partie ventée, nous continuons à progresser, parfois en récupérant d'autres coureurs avec nous, parfois en devant réduire l'allure pour nous attendre.
A mi parcours, dans une côte, je sens déjà des premiers signes de crampes. J'essaye de me ménager dans les suivantes, car je sais que dans la dernière, celle de Champcueil, les pourcentages y seront assez forts.
A la traversée de petits villages, nous croisons d'ailleurs de nombreux coureurs, qui s'abritent où ils peuvent, transis de froid. Certains se tiennent les cuisses, ravagés par les crampes.
Nous ne tardons pas à voir régulièrement les secours qui distribuent des couvertures de survie à tous ces malheureux.
Dans notre petit groupe, même si nous souffrons tous les 3, personne ne moufte, et nous continuons à progresser à une allure régulière.
Nous avons les mains gelées, et les conversations deviennent difficiles, avec des mâchoires qui deviennent elles aussi engourdies. Absorber un gel, relève aussi de la gageure, avec ces mains engourdies. Je n'espère qu'une chose à ce moment de la course: c'est de ne pas avoir à crever, car je mettrais beaucoup de temps à réparer et me refroidirais très vite.
Tout en roulant, JF étreint ses gants, c'est impressionnant la quantité d'eau qui s'en échappe.
Alors que je coupe un peu l'allure en haut du côte, pour attendre mes compagnons, le prends une bonne rafale de vent de coté, et je me retrouve emmené bien malgré moi, à rouler sur le bas coté, sur une partie en terre, en décroché de la partie goudronnée. Petite frayeur, mais je regagne la route, conscient que j'aurais pu crever ou chuter.
Vers la fin du parcours, le vent redevient plutôt favorable, et en plus de devenir un allié, il nous permet de nous sentir un peu moins frigorifiés à présent.
Nous passons la côte de Champcueil, JF a encore de bonnes jambes devant, et nous parvenons tous les 3 en haut, sans que personne n'aie lâché prise.
Il reste une bonne dizaine de kilomètres, relativement plat et vent dans le dos. On peux à présent y croire.
Une dernière portion où il faut être vigilant, car la route est défoncée, et les nombreux trous sont masqués par la présence d'eau. Dernier virage à droite, la ligne d'arrivée nous attends en légère montée, et nous la franchissons ensemble. 10 mètres après celle-ci, je m'arrête pour soulager un besoin naturel, car je ne tiens plus, et je n'ai pas voulu imposer un arrêt à mes compagnons de route.
A peine le temps de boire un verre de coca au ravitaillement, que je commence à greloter de partout. Je réalise à quel point nous avons eu raison de ne pas nous arrêter, et à maintenir une allure régulière.
Nous regagnons les voitures pour nous changer. Il pleut toujours et il faut être un acrobate pour arriver à se contorsionner à l'intérieur. D'ailleurs, de nouvelles crampes font déjà leur apparition.
Après nous être retrouvés à la salle pour y partager le repas, le soleil réapparait à l'extérieur comme pour nous narguer. L'organisation n'aura pas été vernie cette année, et elle aura eu forte à faire pour rapatrier tous les malheureux qui n'ont pas fini la course. Elle aura enregistré un peu moins de 500 inscrits cette année, avec seulement 254 coureurs à l'arrivée, auxquels il faut ajouter près de 80 abandons, soit un quart des coureurs qui étaient au départ.
Même si j'avais connu des conditions un peu similaires, il y a 2 ans, à Hautacam, je n'ai pas le souvenir d'en avoir autant souffert. Les conditions furent vraiment exécrables cette fois, et il fallait être un guerrier pour aller au bout.
Heureusement, grâce à mes compagnons de route, la motivation d'aller au bout est restée intacte, et j'aurais malgré tout pris beaucoup de plaisir à rouler avec eux. JF a assuré devant, en sachant imprimer un bon tempo et à réduire l'allure lorsque nécessaire. Quant à Bruno, il a su gérer ses efforts sans se mettre dans le rouge, et à faire preuve de régularité tout au long de la course. Bravo à lui, pour une première cyclo, c'est une réussite, et ce n'était certainement pas facile à gérer.
Histoire de finir cette journée mémorable en beauté, nous partageons un bon resto tous ensemble, avec Jean-Claude, qui n'a pu prendre le départ avec nous, mais nous lui racontons la course, et lui faisons part des conditions dantesques dans lesquelles elle s'est déroulée.
L'organisation, bien que prise un peu de cours, a très bien géré la situation, pour que tout le monde puisse être rapatrié au départ. Comme toujours, les signaleurs ont été appliqués dans leur tâche, et je me doute que ce n'était pas facile pour eux de rester sous la pluie et en plein vent, durant ces longues heures.
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